Qu’est-ce qui te fait courir ?
Mon cher Quaesitus,
Permets-moi de te poser une nouvelle question :
Qu’est-ce qui te fait courir ?
Courir … se déplacer rapidement ?
Courir … participer à une course ?
Ne trouves-tu pas, Quaesitus, que notre vie ressemble à une grande course. Notre monde moderne est un monde dans lequel tout va toujours plus vite, les gens et les choses.
La course pour produire plus, plus vite, moins cher.
La course pour obtenir un travail satisfaisant et pour le garder.
La course pour gagner plus d’argent et … le dépenser encore plus vite.
La course pour être le premier ou dans les premiers.
La course pour ne pas être mis en marge, sur le bord du chemin.
La course pour vivre intensément.
La course pour plus de plaisir, plus de bonheur.
Même en vacances, on court.
Même … à la retraite, on court encore.
Seule la mort arrête notre course … définitivement.
Mais en fait, t’es-tu demandé pourquoi nous courrons tout le temps ?
J’ai ma petite idée, qui va peut-être te surprendre :
Nous courrons pour nous sentir exister
Le coureur à pied a un objectif, soit un lieu à atteindre, soit une distance à parcourir, il sent le contact avec le sol, il sent ses muscles se tendre et se détendre, il sent le vent sur son visage, il sent la chaleur monter dans son corps, il sent le plaisir ou la douleur … de courir.
S’il est en compétition, il cherche à courir le plus vite, son esprit, vide de toute autre chose, concentré, il cherche à être le premier, il cherche à être devant. Il cherche à gagner : il cherche en fait à se sentir exister à ses yeux et aux yeux des autres.
Pour moi c’est clair : ce qui nous fait courir dans la vie, c’est ce besoin irrépressible de se sentir exister.
En doutes-tu encore ?
Alors considère ceci : quand tu es arrêté, empêché d’avancer, empêché de faire … quelle est ta sensation ?
Quand la maladie ou un accident t’arrête, te cloue sur un lit, impuissant …
Quand le chômage t’arrête, te laissant désœuvré, te donnant cette sensation que tu n’es plus dans le circuit …
Quand ton projet, qui donnait sens à ta vie, échoue, te laissant pour un temps au bord du chemin, regardant ceux qui courent encore …
Quand ton conjoint ou ton partenaire de vie te quitte, te laissant seul, sans affection, sans attention …
… tu es arrêté … seul avec toi-même … impuissant, désœuvré, le vide t’envahit … crois-tu vraiment que là tu te sens pleinement exister ?
Par la multitude de tes occupations et de tes préoccupations … tu te distrais de toi-même. Tu fuis le silence … tu fuis ta profondeur.
Par ta course incessante … tu cherches à te sentir exister … parce que si tu t’arrêtes … alors tu crois perdre ton existence. En fait, tu fuis devant la mort, tu fuis ta profondeur … là aussi.
Alors, avant qu’un événement de ta vie ne t’arrête, pourquoi ne ferais-tu pas une pause
… un arrêt volontaire
… un arrêt « silence »
… un arrêt pour te rencontrer vraiment
… un arrêt pour entrer en contact avec ta profondeur
… un arrêt pour discerner en toi cette préoccupation qui est déjà là,
… un arrêt, non pas pour exister, mais pour être ?
Texte : Thierry Feller
Ce texte est inclus dans un e-book au format PDF que vous pouvez lire ou télécharger. Il est libre de droit. Vous pouvez donc le diffuser comme vous le souhaitez.
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